Coeur caramel
Friselis, frisson, vibration
Volutes de nos baisers frivoles
Nos vis-à-vis sans visa sur la même partition
Fric-frac de nos cœurs farandoles.
Frimas, friction, vibrato
Friandise de notre amour velouté
Nos vocalises viscérales de vive-eau
Virevoltes de nos voyelles fruitées.
Voltige, volupté, janvier
Frontispice de nos âmes qui se frôlent
Nos voyages entre le vitrail voilé
Frou-frou de nos frimousses gaudrioles.
Enfance
Enfance, enfance de l’art
Les pauvres diables
Ton lait beaucoup trop noir
Carnaval misérable.
Enfance, enfance aux armes
Les enfants terribles
Les Contes du Vacarme
De tes joues paisibles.
Enfance, enfance des gares
Tes jardins de l’Enfer
Trésors des poubelles d’un soir
Des anges calcinés du tonnerre.
Enfance, enfance de Rio
Innocence de tes yeux volés
Les cauchemars de l’El Dorado
Contrebande de la lumière ignorée.
Enfance, enfance de l’ennui
Le caprice des supermarchés
Chérubins des alcôves emplies
Les jours fous des rois bien aimés.
Enfance, enfance des Andes
Monica, poupée déchirée
Assise sur le No Man’s Land
Un morceau de pain débarbouillé.
Enfance, enfance silencieuse
L’oubli crève ton cœur
Larmes de suie d’une berceuse
Dans l’abandon griffant ta candeur.
Enfance, enfance d’avant
Des poulbots d’aujourd’hui
Le désamour croqué gentiment
Solitudes nouvelles des trottoirs de Paris.
Tangue Haut
LE TANGO DE MARINA
Por favor, un café bien étranglé,
Sur une terrasse de la rue du Calvaire
Elle s’approcha les poings liés
Rouge et noir sous son regard de Buenos Aires.
D’où viens-tu me lança t-elle
De sa voix blessée d’Amérique Latine
Dans ma tasse elle avait versé des étincelles
S’imaginant que j’étais Argentine.
Elle dansait derrière le zinc assoiffé
Loin des bas-fonds de ses origines
Svp, trois glaçons, vite je suis pressée
Marina avait pour cœur une fleur d’aubépine.
Sur une côte du Soleil au zénith
Elle transporta ses rêves dans une caravelle
Le Nouveau Monde pleurait des larmes de granite
Histoire sans fin de son continent rebelle.
Autour de son sourire roulaient des perles de sang
Je connais des terres qu’aucun homme n’a souillées
Les villes d’Europe hurlent le silence des enfants
J’ai dans la tête les mots et les paysages verts de la liberté.
Paris, Londres, Madrid, Berlin,
Ne lui reste que la fumée du cigare de Gardel
Marina s’éventre sur les spirales d’un misérable calepin
Là où sa plume n’écrit plus que des mots à la citronnelle.
Poète, circulez, lui dit soudain le patron,
Silhouette sauvage des chevaux de la Pampa
Inspirez-vous de la fraîche mélodie de vos boissons
Poésie des ombres du tango de Marina.
Naïade
A l’embrassement des braises du dernier soleil
J’ai couru vers toi à l’appel de tes flots azurins
Dévêtue de la notion du temps qui veille
Je n’ai pas résisté à ton enchantement sibyllin.
Dans le labyrinthe chaotique des émois
Se délecter sans contrainte de l’abandon
Des étreintes écumeuses de tes bras
Qui estompent la sombre couleur des appréhensions.
Emperlée par les effluves de la volupté marine
Je laisse éclore mes chimères insanes
Empreintes de moiteur cristalline
Elles renaîtront dans le salin élixir diaphane.
Sous la clémence feutrée de la splendeur inaltérable
Les Naïades s’éveillent et dansent sur le fluide saphir
Leur langoureux ballet aquatique m’attire vers l’impénétrable
A jamais je m’immerge vers les troubles profondeurs du désir.
Finestra
Les fenêtres...
Les fenêtres tracent une ligne entre l’intérieur de nous et l’horizon. Un lien intangible mais d’une telle magnitude qu’il est impossible de ne pas le sentir. Ce que je regarde est en moi. Les fenêtres ouvrent les murs. Et quand je te regarde nous ne sommes plus qu’une seule impulsion, magnétique, attirante, attractive. Il y a toi, il y a moi et ce fil que personne ne pourrait défaire. Il y a l’horizon de ton âme et la fenêtre de mes yeux. J’ouvre un mur. J’entame le béton des conventions imbéciles. Je pulvérise chaque génération qui me précède en refusant de me soumettre à la règle. Ce lien ne peut pas se défaire. Il est ce qui fait l’homme, il est ce qui fait le genre humain. La toile s’étend, elle n’a pas de frontières. C’est un réseau de connections, nourrit à chaque seconde par un autre, puis un autre et encore un autre regard.
L’Humanité ne conduit à rien.
A rien. Juste un regard qui n’en fini pas de regarder sans comprendre. Un regard vide auquel nous essayons de donner un sens pour calmer la rage de ne pas savoir. Nous ne savons rien. Nous ne sommes rien. Des poupées mécaniques qui répètent des gestes d’ailleurs, des mots d’ailleurs, nous ne sommes que des poupées rigides et mécaniques. Dis-moi où mène ton regard, dis-moi s’il te conduit au-delà d’un certain rêve, d’un imaginaire, d’une sélection d’images autorisées, d’un avatar de toi même. Dis-moi ce qui te conduit. Dis-moi si tu t’arrêtes, là, tout de suite, comme pour un dimanche de solitude où personne ne viendrait taper à ta porte, dis-moi si tu trouverais réponse à ce vide ? Tu n’en sais rien.
Le regard ne porte rien en lui même. C'est la fenêtre de tes yeux qui ouvre mes murs.
Texte de F. Godeau